Pour faire une chanson

Entretien avec Laurent CEREZO, directeur artistique.

Les secrets de fabrication d’une chanson…

Qu’est-ce qui t’a donné envie de travailler sur ce projet ?

Avant tout, je voulais soutenir une cause qui me parle. Le milieu hospitalier a tout mon soutien et c’est une fierté d’apporter ma pierre à l’édifice. Ensuite, c’est un défi artistique. L’originalité du projet et l’investissement des participants m’ont donné envie d’y contribuer.

Est-il facile de travailler sur un morceau aussi connu, sans craindre la comparaison, sachant que Jean-Claude DEQUÉANT (le compositeur original de la chanson) allait l’entendre ?

On entend souvent des parodies de chansons célèbres et soyons franc, ça sonne rarement bien. Pour ce projet, je parlerais plutôt d’adaptation. Le texte est bien écrit, le nombre de pieds est respecté et le choix des chanteurs – pourtant amateurs – est au niveau de la technique que demande la chanson. Il fallait aussi faire sonner le tout en respectant le mixage original, très marqué « années 80 ».

« Chanter en studio est une expérience qui peut être stressante ! »

 Comment as-tu dirigé les 12 apprentis chanteuses / chanteurs en studio ?

Honnêtement, ce n’était pas très difficile. Les interprètes étaient prêts. Ils avaient répété et ils connaissaient les parties qui leur avaient été confiées. Il a surtout fallu les rassurer. Chanter en studio est une expérience qui peut être stressante quand on n’a pas l’habitude. Je me suis occupé des placements, de la distance par rapport au micro. Une fois les aspects techniques réglés, on a appuyé sur « REC » et la magie a opéré.

Le plus difficile était de les empêcher de battre la mesure avec le pied !

On imagine souvent qu’une chanson est enregistrée en une seule fois, avec tout le monde derrière le micro…

On pourrait croire que l’on enregistre tout d’un bloc… c’est une idée reçue. On enregistre plusieurs versions, légèrement différentes, on réajuste, on coupe, on reprend le même passage avec un seul chanteur… C’est un travail qui prend beaucoup de temps, alors avec un groupe complet, c’est un assemblage minutieux ! De la Haute Couture musicale !

Comment expliques-tu que souvent, les parodies sonnent « amateur » ?

Je n’aime pas trop le mot « parodie », ça résonne souvent comme quelque chose de péjorativement drôle. Les comiques reprennent régulièrement des chansons avec des textes pour faire rire. Dans la plupart des cas, la prise de son et le mixage ne sont pas les choses les plus importantes à leurs yeux. Ils produisent une œuvre la veille pour le lendemain sur Tiktok, souvent au détriment de la qualité. Je n’ai rien contre ça, bien sûr, mais pour cet enregistrement, tout a été organisé parfaitement et minutieusement.

De la Haute Couture musicale !

Comment se passe le mixage d’une chanson ?

Les étapes de prise de son et le mixage ont été réalisées dans deux studios différents.

Après la séance d’enregistrement, j’ai reçu la totalité des pistes – à savoir 33 pistes pour les voix et 2 pistes instrumentales – que j’ai importées dans DAW [Digital Audio Workstation, ndlr]. Il y a beaucoup plus de pistes que de chanteurs, puisqu’on a enregistré plusieurs voix par personne : voix principale, voix de chœur, voix à la tierce, etc…

Ensuite, il a fallu choisir les meilleures pistes, les éditer, retoucher quelques placements rythmiques, certaines notes… des choses que l’on fait aussi pour les professionnels.

Puis j’ai travaillé les fréquences de chaque interprète et j’ai compressé les pistes, afin d’homogénéiser le tout. Enfin, j’ai joué sur le panoramique « gauche / droite » pour donner un effet « question / réponse » à la chanson. Sans oublier quelques grosses reverb pour donner la tonalité « années 80 » et des delay, pour apporter la touche finale !

Combien d’heures de travail ?

L’édition des pistes prend le plus de temps. Le mixage complet a pris une journée, sans oublier les retouches. Je mixe, j’écoute et je laisse passer un peu de temps, afin d’avoir les oreilles reposées, et j’y retourne pour modifier.

Je suis un éternel insatisfait .

Comment choisis-tu l’équilibre des voix ?

J’essaie d’associer les « grains de voix » dans la continuité d’une même phrase pour ne pas déstabiliser l’attention de l’auditeur. Au contraire, pour passer d’un couplet à un refrain, par exemple, je peux passer d’une voix d’homme à une voix de femme. Sur les refrains, les voix de chœur sont croisées : les choristes « hommes » accompagnent les chanteuses, et les voix de femmes accompagnent les chanteurs. Il faut que ce soit dynamique.

Quelles sont les particularités de ce projet ?

D’abord, le nombre d’intervenants. Il y a douze chanteuses et chanteurs sur ce morceau.

Ensuite, les deux versions différentes qu’il a fallu produire : une version que l’on appelle traditionnellement « radio edit » et une version longue pour mettre en musique le court-métrage projeté en salle.

Cette dernière version, la « bande originale du film », a demandé une attention particulière. Mylène Farmer et Laurent Boutonnat étaient des pionniers en termes de clips, qui constituaient de véritables court-métrages. Je me suis donc inspiré des mixages des artistes pour reproduire l’ambiance d’origine.

Combien de pistes comporte le mixage final ?

 Il y a plus de 40 pistes, avec les chœurs, les pistes d’effets… Alexandra et moi avons aussi enregistré quelques voix supplémentaires pour ajouter des harmonies.

Les refrains du « grand final » sont très chaleureux, combien de pistes y a-t-il entre les voix « lead » principales et les chœurs ?

Entre les pistes d’harmonies et les pistes de groupes pour faire « masse », on est environ à 20 pistes. Il y avait du monde.

Si l’hôpital t’appelle l’an prochain pour un nouveau projet, tu réponds quoi ?

J’arrive !